Certains pensent que pour atteindre la cible de 2030, les consommateurs devront songer à vendre leur voiture, cesser de voyager, en plus de devenir végétaliens. Or, ce n’est pas du tout le cas. Voici des stratégies pour réduire ses gaz à effet de serre (GES) sans chambouler son mode de vie.
L’HEURE DES CHOIX
Parmi les familles analysées, une parvient plutôt aisément à atteindre la cible de 2030 en matière de GES en maintenant un bon rythme de vie. Pour parvenir à atteindre cette cible de 2,7 tonnes par personne, soit 29 % sous la moyenne, elle a cependant dû faire des choix.
Lesquels ? D’une part, cette famille de quatre ne conduit qu’une seule voiture à essence de grosseur moyenne, à raison de 15 000 km par année. Si besoin est, ses membres font du covoiturage, misent sur les transports en commun ou encore optent pour une deuxième voiture électrique. Cette décision permet d’abaisser de moitié leur consommation de GES liée au transport automobile, à 0,9 tonne par personne.
En matière d’alimentation, la solution familiale passe par une réduction de 66 % de la consommation de bœuf, remplacé par des légumineuses, des céréales et du tofu. Ainsi, plutôt que de manger hebdomadairement 325 g de bœuf par semaine, leur consommation est réduite à environ 110 g. Total pour l’alimentation : 0,7 tonne de GES.
Ces « sacrifices » leur permettent de s’offrir un voyage en avion par année, soit en Europe, soit dans le Sud, en alternance, ce qui génère 1,12 tonne par personne.
Grand total GES : 2,6 tonnes par personne, soit légèrement moins que notre cible de 2030, de 2,7 tonnes.
Une deuxième voiture, mais un voyage de moins
Maintenant, certains pourraient juger trop restreignant le faible nombre de kilomètres en voiture. Pour se permettre une deuxième auto (11 000 km) tout en demeurant sous la cible de 2030, il suffit à cette famille de quatre personnes d’espacer les voyages à tous les deux ans.
Autre option valable pour les familles de quatre, cette fois pour les carnivores : une seule voiture (15 000 km), un voyage tous les deux ans, mais une consommation de bœuf réduite de seulement 12 % plutôt que de 66 %.
Bref, réduire ses GES exige de faire des choix, mais on est très loin d’une vie d’ascète.
Ce genre de solutions est évidemment plus facile à atteindre pour les citadins que les gens en région, plus dépendants de la voiture. Elle est aussi plus réalisable pour ceux qui sont déjà économes en GES que pour ceux qui ne s’en soucient guère.
Il va sans dire, par exemple, que le couple aisé qui fait ses 35 000 km de voiture annuellement, ses deux voyages et dont l’alimentation est riche en viande rouge ne parviendra pas à changer radicalement son mode de vie. Son niveau de consommation est de 8,1 tonnes par personne, deux fois plus que la moyenne.
Dans ce cas, il faudrait se départir des deux voitures à essence, en plus de réduire de moitié les longs voyages et de 50 % la viande de bœuf.
Acheter des arbres
Autre solution moins radicale : compenser les émissions excédentaires de GES en finançant des projets réducteurs de carbone ou qui absorbent du carbone. Par exemple, pourquoi ne pas contribuer à la plantation d’arbres ?
Le projet Carbone Boréal, de l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC), répond à la norme ISO 14064, qui certifie la compensation de GES avec sa plantation d’arbres. Par exemple, un couple qui fait l’aller-retour Montréal-Paris devrait financer la plantation de 47 arbres pour compenser, ce qui se traduit par une facture de 182 $. Pas si cher quand on a les moyens de se rendre aussi loin !
Étant donné l’improbable mouvement généralisé de contribution volontaire, le gouvernement devra adapter sa fiscalité pour pénaliser les surconsommateurs de GES et récompenser les économes.
Des solutions par secteur
Auto
La cible : réduire les GES des déplacements automobiles de 28 % d’ici 2030, soit de 1,88 tonne à 1,35 tonne par habitant. D’abord, les conducteurs bénéficient des avancées technologiques lors du remplacement de la voiture. Entre les années modèles 2012 et 2017, par exemple, les constructeurs ont réduit l’émission de GES d’environ 9 %, en moyenne, selon un échantillon tiré des données de Ressources naturelles Canada. Ne reste plus qu’une réduction de 19 %, environ. Tant qu’à changer de véhicule, pourquoi ne pas choisir moins énergivore ? Les entrepreneurs qui doivent absolument rouler en Dodge RAM, par exemple, pourraient prendre un six cylindres plutôt qu’un huit, économisant ainsi 21 % de GES. À savoir : une voiture hybride réduit la consommation de GES de 75 %.
Habitation
Les GES du secteur résidentiel ont beaucoup diminué, mais ils sont tout de même de 0,54 tonne par habitant au Québec. Ce volume vient notamment des maisons encore chauffées au mazout. Leur conversion vers l’hydroélectricité réduirait ce bilan, puisque la consommation d’hydroélectricité n’émet pas de GES. Autre stratégie habitation-auto : se rapprocher du travail pour diminuer le kilométrage de ses déplacements. Par exemple, un lieu de travail plus près pourrait permettre de réduire de 20 % le kilométrage des deux véhicules d’une famille (de 30 000 km à 24 000 km, par exemple), contribuant grandement à attendre la cible pour l’auto (-28 % d’ici 2030).
Alimentation
D’ici 2030, il faudrait réduire ses GES alimentaires de 28 % par habitant (de 1,48 tonne à 1,06 tonne). Cet objectif passe nécessairement par une moins grande consommation de bœuf, puisque le bœuf représente environ la moitié de ces émissions de GES. Pour y arriver, deux scénarios suggérés. Le premier : réduire sa consommation de bœuf d’environ la moitié, soit de 325 g à environ 165 g par semaine, qu’on compense avec des légumineuses, du tofu et des céréales. Le deuxième : pour ceux qui raffolent du bœuf, songez plutôt à réduire la consommation de toute viande de 30 %, encore une fois compensée par d’autres aliments riches en protéines.
Avion
Pour atteindre la cible de 2030, chaque habitant devrait réduire ses GES de 40 % pour le transport aérien (de 0,52 tonnes à 0,31 tonne), compte tenu de l’explosion des voyages et de la croissance de la population. Il faudrait donc supprimer deux voyages sur cinq, environ, ce qui est fort ambitieux. Il y a cependant d’autres moyens. Un couple qui tient mordicus à voyager beaucoup pourrait, dans la vie de tous les jours, se déplacer seulement en transports en commun ou en auto électrique. Une autre façon d’atteindre l’objectif serait de financer des projets réducteurs de carbone ou qui absorbent du carbone, comme la plantation d’arbres.